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Tribune


01/03/2007


La modernisation de la diffusion audiovisuelle : l'extinction de la diffusion analogique



 

Le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a été adopté en commission mixte paritaire le 22 février dernier. Ce texte va permettre la réception de l'ensemble de l'offre gratuite de programmes de la télévision numérique hertzienne terrestre (TNT), soit aujourd'hui dix-huit chaînes, par l'ensemble de la population française.
Son objet principal est la migration de la diffusion de la télévision de l'analogique vers le numérique. L'accélération du déploiement de la télévision numérique terrestre (TNT) sur l'ensemble du territoire national a pour objectif un transfert complet le 30 novembre 2011. Ce choix répond en particulier aux recommandations du Conseil de l'Union européenne qui, dans ses conclusions du 14 novembre 2005, a invité les États membres, dans la mesure du possible, à mener à terme le passage au numérique avant 2012, ainsi qu'à publier avant 2006 leurs propositions en la matière. Ce texte crée par ailleurs le cadre juridique pour la diffusion de la télévision en haute définition et pour le lancement rapide de la télévision mobile personnelle (TMP). Ces nouvelles formes de diffusion de la télévision contribueront d'ailleurs à la création, via un rehaussement de la taxe alimentant le compte de soutien à l'industrie des programmes dont l'assiette est par ailleurs modernisée et répartie entre les distributeurs de chaînes de télévision et les éditeurs de services diffusant en clair en hertzien terrestre.
Plutôt que de traiter tous les aspects de ce texte, nous aborderons ici son objet premier, c'est-à-dire l'extinction de la diffusion analogique, dont la réussite est un enjeu essentiel de la politique audiovisuelle des prochaines années.
I. La migration vers la diffusion numérique A. L'organisation des opérations liées à l'extinction de la diffusion analogique L'extinction de la diffusion analogique répond à un schéma national de basculement vers le numérique approuvé par arrêté du Premier ministre après une consultation publique organisée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). En vertu du troisième alinéa de l'article 99 de la loi du 30 septembre 1986 tel qu'issu de la loi nouvelle, le CSA procède, à compter du 31 mars 2008, à l'extinction progressive, par zone géographique, de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Enfin, au 30 novembre 2011, date limite fixée par le premier alinéa du même article 99, la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique prend fin. Le CSA devra fixer neuf mois à l'avance pour chaque zone géographique, service par service, et émetteur par émetteur, une date d'arrêt de la diffusion analogique. Le CSA devra tenir compte de l'équipement des foyers pour la réception numérique hertzienne terrestre et de la disponibilité effective en mode numérique des services de télévision. Dès l'entrée en vigueur de la loi, le CSA est habilité à retirer certaines fréquences analogiques dans des zones géographiques limitées. C'est l'objet de l'article 98 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, destiné à permettre l'extension de la couverture de la TNT dans les zones à forte pénurie en fréquences.
B. Des engagements renforcés en matière de couverture numérique hertzienne terrestre L'objectif de couverture actuellement assigné aux différents opérateurs par les décisions du CSA du 10 juin 2003 est de couvrir 85 % de la population par la TNT. L'extension de la couverture du territoire par la TNT, objet des articles 96-1 et 97 de la loi du 30 septembre 1986 issus de l'article 5 de la loi, implique l'extinction de la diffusion par voie analogique, qui accapare en effet une part importante de la ressource radioélectrique déjà partagée.
Le développement de la TNT nécessite son extinction anticipée pour libérer l'espace nécessaire à la diffusion numérique des nouveaux services. Les chaînes historiques, actuellement diffusées en analogique, assureront en numérique une couverture terrestre à 95 % de la population. Elles bénéficieront alors d'importantes économies de coût de diffusion. Pour atteindre ces objectifs, la loi prévoit des mécanismes destinés à inciter les opérateurs de télévision à étendre leur zone de desserte numérique, en tenant compte des coûts croissants de diffusion impliqués par l'extension de la couverture TNT au-delà de 85 % de la population.
Un groupement d'intérêt public (GIP) sera créé afin de mettre en oeuvre les mesures propres à permettre l'extinction de la diffusion des services nationaux par voie hertzienne terrestre en mode analogique et la continuité de la réception de ces services par les téléspectateurs. Le GIP, regroupant l'État, les éditeurs privés de services nationaux de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique, la société France télévisions et la chaîne culturelle européenne Arte, pourra se voir confier la coordination de la réalisation des opérations de réaménagement assumée jusqu'à présent par l'Agence nationale des fréquences (ANFR). Il aura également pour mission de gérer un fonds d'aide pour les foyers les plus démunis, afin de les aider à s'équiper en vue de la réception numérique hertzienne terrestre. Ce fonds vise les foyers exonérés du paiement de la redevance et ne recevant que les services diffusés en mode analogique. L'aide, sous condition de

ressources du foyer fiscal, sera modulée en fonction des capacités contributives des bénéficiaires et des solutions techniques de réception disponibles sur la zone. Elle est donc neutre sur le plan technologique.
En contrepartie de cette charge qui s'ajoute à celle de couvrir la population à 95 %, les autorisations numériques de ces éditeurs nationaux pourront être prorogées de cinq ans. Les autres chaînes de la télévision numérique terrestre pourront également choisir d'étendre leur couverture au-delà de 85 % de la population française, sous le contrôle du CSA, en souscrivant des engagements complémentaires qui seront alors assortis d'une prorogation de la durée de l'autorisation (susceptible d'aller jusqu'à cinq ans). Les modalités précises en seront définies par un décret en Conseil d'État.
C. L'offre satellitaire gratuite De manière complémentaire, la couverture satellitaire permettra à 100 % des Français dans les trois mois qui suivent la promulgation de la loi, c'est-àdire dès l'été 2007, de recevoir gratuitement les dixhuit chaînes de la TNT. La numérotation est alors la même qu'en mode numérique hertzien terrestre.
Cette mesure pourra d'ailleurs être réalisée dès la promulgation du texte, puisque tout distributeur de services dont l'offre de programmes comprend l'ensemble des services nationaux diffusés en clair par voie hertzienne terrestre en mode numérique peut mettre gratuitement ces programmes à la disposition du public pour une qualité et une couverture au moins équivalente à celles de la diffusion analogique. L'offre satellitaire gratuite diffusera tous les programmes du service public, et en particulier les 24 éditions régionales de France 3, qui bénéficieront d'une compensation financière de la part de l'État, ainsi que les programmes de France Ô. La télévision publique sera donc renforcée par cette offre satellitaire.
II. La question de la compensation du préjudice subi par les chaînes analogiques Les nouvelles dispositions des articles 99 et 104 de la loi du 30 septembre 1986 issues de l'article 5 de la loi instituent des dispositions favorables aux éditeurs de services nationaux de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique dont l'implication forte est indispensable à l'extinction de la diffusion analogique. Le sixième alinéa de l'article 99 prévoit ainsi, on l'a vu, la prorogation de plein droit de cinq ans des autorisations de diffusion en mode numérique des services de télévision nationaux analogiques, dans la mesure où ces services deviennent membre du groupement d'intérêt public chargé de mettre en oeuvre l'extinction de la diffusion analogique prévue par l'article 102. L'article 104, s'inspirant du troisième alinéa du III de l'article 30-1 de la loi de 1986 issu de la loi n° 2000-719 du 1er août 2000, accorde, d'autre part, aux éditeurs nationaux de services de télévisions diffusés en mode analogique une « chaîne compensatoire » à l'extinction complète de leur signal analogique. Cette chaîne correspond à la réparation d'un préjudice subi par les diffuseurs analogiques. Elle est par ailleurs assortie d'obligations de production renforcées.
En adoptant ces dispositions, le législateur n'a cependant nullement consenti aux éditeurs concernés les “privilèges” que dénoncent les députés saisissants. Il s'est, en effet, borné à leur accorder des contreparties destinées à compenser l'atteinte qu'il portait à leur situation spécifique, tenant à ce qu'ils sont seuls affectés par l'extinction de la diffusion par voie analogique.
L'ensemble du dispositif a ainsi été validé par la décision (n° 2007-550 DC) du Conseil Constitutionnel du 27 février 2007. En effet, les termes actuels des autorisations de diffusion des trois éditeurs nationaux de services diffusés en mode analogique, Canal plus, TF1 et M6 sont fixés, respectivement, aux 5 décembre 2010, 29 février 2012 et 15 avril 2012. Ces échéances valent à la fois pour la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode analogique de leurs programmes et pour celle de leur reprise intégrale et simultanée en mode numérique sur la TNT. Le deuxième alinéa de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui accordait à ces opérateurs un droit à reprise de leur programme en TNT prévoit en effet que « cette autorisation est assimilée à l'autorisation initiale dont elle ne constitue qu'une extension ».
En prévoyant la fin de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne en mode analogique au plus tard le 30 novembre 2011, le législateur porte atteinte aux droits qui avaient été ainsi consentis aux éditeurs de ces services. La Section de l'intérieur du Conseil d'État a en effet indiqué, dans son avis du 23 mai 2006 (n° 373035), que l'extinction anticipée des services de diffusion par voie analogique remet en cause les autorisations créatrices de droit qui avaient été conférées aux intéressés.
Or, il ressort des dispositions de la loi qu'elle réduit, d'une part, les durées des autorisations de diffusion accordées aux éditeurs nationaux de service en mode analogique. Ces durées avaient pourtant été prorogées de cinq ans par application des dispositions de l'article 82 de la loi du 1er août 2000. Afin d'inciter les opérateurs “historiques” à participer au lancement de la TNT, et d'en garantir ainsi le succès, le législateur avait adopté différentes mesures incitatives en leur faveur, au nombre desquelles figurait la prorogation pour une durée de cinq ans de leur autorisation analogique initiale si elles acceptaient de rediffuser leur programme en numérique. Les exigences posées par l'article 82 avaient même été renforcées par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 qui avait prévu que le bénéfice de la prorogation était écarté si l'éditeur de services ne débutait pas effectivement ses émissions en mode numérique ou les interrompaient.
D'autre part, la loi met un terme au droit des éditeurs “historiques” à une double diffusion de leurs programmes. Les éditeurs nationaux de services par voie analogique bénéficient en effet, à ce jour, d'un droit à une diffusion analogique de leurs programmes, mais également d'un droit à une rediffusion en mode numérique de ceux-ci, appelé “droit au simulcast ”. Ce droit, organisé par le deuxième alinéa de l'article 30-1 précité de la loi, permettait de garantir aux téléspectateurs une offre de nouveaux programmes par la TNT, ainsi que la continuité de la réception de ceux dont ils bénéficiaient jusque-là.
Les avantages réservés par la loi déférée aux seuls éditeurs nationaux de services de télévision diffusés en mode analogique sont apparus dans ces conditions, comme pleinement justifiés par une différence objective de situation en rapport avec l'objectif d'intérêt général poursuivi par la loi. Ces opérateurs sont dans une situation différente de celle des autres éditeurs de la TNT dès lors que ces derniers ne sont pas directement affectés par l'extinction de la diffusion par voie analogique.
Le choix du législateur a donc été confirmé. Demeure maintenant la nécessité pour chacun des intervenants (gouvernement, régulateur, chaînes de télévision), de se mobiliser afin de réussir cette opération d'envergure, véritable mutation de l'audiovisuel français.
1er mars 2007 - Légipresse N°239
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