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Accueil > Infractions de presse > Le droit à l'humour et ses limites - Infractions de presse

Liberté d'expression
/ Tribune


11/12/2023


Le droit à l'humour et ses limites



 

L'humour est un genre particulier qui participe de la liberté d'expression. Fait pour choquer, créer des brèches, il est par nature irrespectueux et transgressif. « On doit tolérer l'inconvenance, grossière et provocatrice, l'irrévérence sarcastique sur le bon goût desquelles l'appréciation de chacun reste libre, qui ne peuvent être perçues sans tenir compte de leur vocation ouvertement satirique et humoristique, qui permet des exagérations et des déformations et présentations ironiques(1) ».

Mais l'humour reste un contrat. Il suppose, pour bénéficier de cette impunité, qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur le fait que le message litigieux doit s'interpréter au second degré. Lorsque le rire surgit de manière impromptue, lorsqu'il est inattendu et non prémédité comme lorsqu'il naît d'un lapsus, d'une phrase maladroite ou d'une situation incongrue, l'intention non coupable est alors incontestable. Lorsque le rire est recherché par un blagueur, il suppose de n'être mû que par la volonté (le mobile) de faire rire et, ce faisant, par l'absence de volonté de nuire ou de blesser. Ce contrat avec le lecteur ou l'auditeur ne doit comporter aucune équivoque. Il ne faut pas que celui qui s'exprime cherche à régler des comptes ou à promouvoir une idéologie.

Il y a des critères de présomption classiquement retenus par les juges. Ce sont, d'une part, le ton volontairement outrancier sarcastique qui révèle un caractère fantaisiste, exclusif de toute prétention au sérieux(2), et, d'autre part, la qualité d'humoriste, désigné et annoncé comme tel(3). S'il apparaît que la blague, la farce, ne sont pas uniquement destinées à faire méchamment rire, le contrat est caduc. L'immunité du discours humoristique cesse alors(4). Il est sans doute difficile pour le juge de se prononcer sur l'intention fondamentale qui a présidé à la tenue d'un message qui revendique le « droit à l'humour ». Mais cela est essentiel lorsqu'il faut juger s'il tombe, ou non, sous le coup de la loi. Le second degré est en effet un rempart, ressortant à une forme d'immunité, contre la constitution d'une diffamation, d'une injure, d'une atteinte à un droit de la personnalité ou d'une incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination(5).

Le juge ne peut s'exonérer, à ce titre, d'une analyse fine du propos litigieux, car l’« humour suppose un usage du langage qui va au-delà de la littéralité de ce qui est dit, il joue sur les évocations, les allusions, les sous-entendus et les doubles sens. Pour toucher juste, l'humour doit se montrer hypersensible à une culture dont il exploite les références historiques, les stéréotypes et les préjugés(6) ». Le chemin est en fait étroit. Mais il y a une frontière qui ne peut jamais être franchie, c'est celle du respect de la dignité humaine(7).

11 décembre 2023 - Légipresse N°419
605 mots
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