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Communication numérique
/ Tribune


20/09/2022


Anonymat sur internet, la Cour de cassation emboîte le pas de la CJUE



 

L'anonymat est la marque originelle d'internet. Et, si un régime libéral démocratique de diffusion des informations est évidemment celui de la liberté, il n'est pas celui de l'impunité. La liberté a pour corollaire la responsabilité. La question de l'identification des contributeurs et créateurs de contenus sur internet qui sont anonymes était au centre des discussions, lorsqu'il a fallu réglementer le secteur. Si elles ont abouti à mettre hors du champ de la responsabilité les intermédiaires techniques, c'est qu'on a considéré qu'il était impossible de leur imposer un contrôle de la licéité des milliards de données qu'ils charrient. C'est ainsi que la directive du 8 juin 2000 dite « Commerce électronique », puis sa transposition en droit français dans la LCEN du 21 juin 2004 ont choisi de laisser les seuls auteurs des messages devoir en répondre.

Le système, depuis, fonctionne plus ou moins bien. Il impose aux plaignants, victimes de messages et contenus portant atteinte à leurs droits, d'avoir recours au juge pour obtenir les renseignements indispensables à l'identification de leurs auteurs auprès des hébergeurs, sauf à renoncer à porter une réclamation ou engager une action à leur encontre. Le recours au juge est indispensable car les plateformes refusent de les donner sur simple demande. C'est souvent un parcours du combattant pour le demandeur qui peut, soit déposer une requête au juge civil, soit, s'il s'agit d'une infraction, saisir les services du parquet ou un juge d'instruction par le dépôt d'une plainte. Il faut alors être très déterminé et avoir les moyens d'engager de telles poursuites.

Or, voici que, coup sur coup, ce chemin étroit et escarpé pour faire valoir ses droits semble se fermer. C'est tout d'abord la loi du 30 juillet 2021(1) qui, sans crier gare(2), a interdit au juge civil de requérir désormais auprès des opérateurs la révélation de l'identité de l'auteur d'un message ou contenu litigieux qui serait resté anonyme. Elle a, en effet, modifié l'article 6-II de la LCEN en limitant les réquisitions judiciaires à un nombre limitatif et exceptionnel de cas tenant à « la prévention des menaces contre la sécurité publique et la sauvegarde de la sécurité nationale »(3).

Il restait le juge pénal. Et voici que la chambre criminelle de la Cour de cassation(4), s'alignant, à son tour, sur la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne(5), n'autorise plus les procureurs et services de police à accéder aux données des opérateurs d'internet au cours de leur enquête, sauf donc s'il s'agit de lutter contre la criminalité la plus grave ; et ce, pour préserver la vie privée des citoyens. Si l'on ajoute que les plateformes le plus souvent américaines ne peuvent être valablement mises en cause, au titre de la coresponsabilité de l'article 6 de la LCEN, en cas de non-respect d'une notification de contenu illicite, protégées qu'elles sont par le Premier amendement américain, on peut nourrir de légitimeS inquiétudes sur l'impunité qui va désormais régner sur internet, dès lors que l'auteur du message sera inconnu. Il en va pourtant d'un autre droit fondamental qui est l'accès au juge et le droit à réparation des préjudices qui sont causés aux personnes.

20 septembre 2022 - Légipresse N°406
651 mots
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