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Accueil > Droit économique des médias > Droit économique des médias (1er mai 2018 – 30 avril 2019) - Droit économique des médias

Droit économique des médias
/ Synthèses


29/08/2019


Droit économique des médias (1er mai 2018 – 30 avril 2019)



S'agissant du droit économique des médias, la période considérée a sans doute été marquée par une assez grande continuité, tant en ce qui est constitutif d'une économie encadrée que d'une économie assistée. Les difficultés, du secteur de la presse périodique notamment, subsistent et peut-être même s'aggravent. Les apports du droit apparaissent assez inaptes à y remédier.

 

Comme indiqué dans les précédentes synthèses annuelles sur le droit économique des médias(1), tous les éléments du droit des médias (régime de responsabilité, statut des journalistes, propriété intellectuelle…) ont aussi, et d'une manière qui n'est pas qu'accessoire, une dimension ou un impact économique. Objet d'autres synthèses de même nature et périodicité dans Légipresse, ils ne sont cependant pas envisagés ici. Sous ce titre de « droit économique des médias »(2), sont essentiellement considérées les entreprises et leurs activités de production et de diffusion des moyens de communication, supports d'information et de créations littéraires et artistiques, en ce qu'elles sont, à cet égard (création, financement, fonctionnement…), l'objet d'un droit (français et éventuellement international ou européen) plus ou moins spécifique, adapté et efficace, ou qu'il conviendrait d'élaborer, d'appliquer et de faire respecter en prenant en compte leurs fonctions et leurs finalités politiques, sociales et culturelles. S'il s'agit d'entreprises et d'activités industrielles et commerciales, celles-ci ne sont en effet pas tout à fait comme les autres, ou ne sont ou ne devraient pas être que cela. Ces entreprises sont d'une nature et ont une vocation particulière. La réalisation de profits ne peut pas être leur seule préoccupation et finalité. Le droit doit ou devrait en tenir compte, tant en leur imposant des contraintes spécifiques qu'en leur accordant, si nécessaire, quelques protections, facilités ou avantages.

De l'actualité de l'année écoulée (de mai 2018 à avril 2019), sont relevées, à cet égard, quelques interventions législatives ou réglementaires et de rares décisions de justice, et surtout des évolutions et des réalités, dans la vie de ces entreprises et activités, qui en sont plus ou moins conformes et respectueuses, ou qui en soulignent les inadaptations et éventuellement, pour une plus grande conformité avec les objectifs officiellement visés, les nécessités de réformes et d'interventions nouvelles.

Les éléments du droit économique des médias(3) paraissent répondre à deux tendances et préoccupations essentielles : celles d'une économie encadrée (I), correspondant, selon la tradition du libéralisme économique, à la théorie de « l'État gendarme », se préoccupant du bon fonctionnement des mécanismes économiques, du respect des pratiques concurrentielles et de la sanction des manquements et abus ; et, parce que celle-ci ne produit pas toujours, en la matière, les résultats ou les effets escomptés, celle d'une économie assistée (II), de « l'État providence ». Celle-ci, par ses aides et interventions, cherche officiellement, et en espérant que cela ne soit pas que théorique ou par soumission à quelques groupes de pression disposant d'un fort pouvoir d'influence, à donner, à la liberté d'information proclamée, plus de réalité et un caractère plus concret, en vue de satisfaire ainsi les droits du public.

I - Économie encadrée

Les éléments d'une économie encadrée des entreprises et des activités médiatiques concernent la production de l'information (A) et de toutes autres sortes de créations, de messages et de contenus, et la diffusion de l'information (B) ainsi rendue accessible au public.

A - Production de l'information

Au cours de l'année écoulée, l'actualité du droit relatif à la production de l'information, ou de ce qui peut être ainsi qualifié, est, s'agissant d'une économie encadrée, pratiquement inexistante pour ce qui est de l'apport législatif et réglementaire (1), fort réduite en ce qui concerne l'apport jurisprudentiel (2), mais bien plus riche et abondante en faits d'actualité (3) à considérer, par référence au droit existant, à la réalité, pas toujours vérifiée, de son application, ou aux nécessités de sa réforme et de son adaptation.

1 - Apport législatif et réglementaire

Un rapport parlementaire s'est félicité, à propos de l'Agence France Presse (AFP), principale productrice d'informations, de ce que (depuis la réforme introduite dans la loi du 10 janv. 1957, par la loi du 17 avr. 2015) son conseil d'administration « ne soit plus entre les mains des principaux clients de l'agence » qu'étaient, jusqu'alors, les représentants des quotidiens. Il a estimé qu'il conviendrait encore d'en diversifier la composition pour mieux y associer les nouveaux clients, s'agissant notamment d'autres publications périodiques et des médias électroniques(4).

2 - Apport jurisprudentiel

Les quelques décisions de justice rendues, en la matière, au cours de la période considérée ont concerné la situation d'entreprises éditrices de presse en difficultés et leur avenir.

Fin mai 2018, le Tribunal de commerce de Paris acceptait la reprise de Rollin Publications, la société éditrice de XXI et de 6Mois, par Le Seuil, associé à l'éditeur de La Revue dessinée. Trois autres candidats s'étaient manifestés, avant de renoncer : le groupe Le Monde, Éditis et le groupe Hildegarde (qui détient Le films français, Première Studio et Causette)(5).

Début 2019, le journal L'Humanité, qui a subi une baisse de son chiffre d'affaires de plus de 6 % en un an, s'est déclaré en cessation de paiements. Le 31 janvier, sur décision du Tribunal de commerce de Bobigny, il a été placé en redressement judiciaire avec poursuite d'activité pour une période d'observation de six mois. Le quotidien indiquait alors avoir collecté un million d'euros auprès de ses lecteurs, tandis qu'aucune banque n'avait voulu s'engager à ses côtés(6). De nombreux journaux éprouvent les mêmes difficultés mais certains d'entre eux au moins peuvent s'adosser aux groupes (de presse ou industriels) dont ils relèvent. Cela n'est pas le cas du quotidien communiste. Il convient donc de considérer, dans tous ses aspects et ses effets, pas toujours négatifs, l'appartenance de titres de presse à un groupe et les phénomènes de concentration. Y être rattachés, c'est assurément un moindre mal par rapport à la situation dans laquelle, sans cela, ils sont amenés à disparaître.

3 - Faits d'actualité

De nombreux faits et éléments d'actualité concernant ces entreprises et activités de production de l'information, dans le cadre juridique, à peine spécifique et qui montre ainsi ses limites, qui est le leur, peuvent être mentionnés s'agissant de la presse périodique, d'une part, et des autres secteurs de l'information et de la création ou production éditoriale, d'autre part.

a) Presse périodique

L'année en cause a été marquée par de nombreux changements dans la propriété des entreprises éditrices de presse ou au moins dans la répartition du capital des sociétés concernées, par des opérations de cessions mais aussi de concentration et autant de tentatives de création que de disparitions de titres de presse, y compris parfois s'agissant des mêmes publications (au taux de « mortalité infantile » élevé) au cours de cette courte durée(7). Le droit commun a alors prévalu à cet égard.

L'hebdomadaire Vraiment a interrompu sa parution après seulement sept semaines d'existence. Il a été constaté qu'il n'était « pas parvenu à trouver sa place dans le paysage tourmenté des “news magazines”, bousculé par la chute des ressources publicitaires et la crise du principal distributeur de presse, Presstalis ». Les initiateurs du projet ont expliqué qu'ils s'étaient donné « dix-huit mois pour atteindre » leurs objectifs, mais qu'ils en étaient « tellement loin (…) qu'il n'était pas réaliste d'attendre plus longtemps ». En conséquence, ils ont préféré « arrêter les frais avant que la facture ne soit trop lourde »(8).

Fin mai 2018, était annoncé le départ du directeur de Valeurs actuelles. Bien que cela ait été présenté comme décidé d'un commun accord, d'autres observateurs faisaient état de « tensions avec les actionnaires qui ont racheté le titre en 2015 »(9).

En juillet 2018, est intervenue la vente de l'hebdomadaire Point de vue, par le groupe Altice, à Royalement Vôtre Éditions, consortium rassemblant Artémis, la holding de la famille Pinault, propriétaire notamment du Point et des éditions Tallandier, et Stéphane Bern, animateur de radio et de télévision, expert de l'actualité des « têtes couronnées ». Altice, le groupe de Patrick Drahi, annonçait alors vouloir recentrer ses activités autour de L'Express et de Libération.

En septembre 2018, différentes organisations professionnelles de presse ont constitué l'Alliance de la presse d'information générale (APIG), regroupant 305 titres publiés par 175 entreprises éditrices, cherchant ainsi à mieux défendre leurs intérêts face aux géants du numérique et notamment à faire reconnaître, à leur profit, dans le cadre national comme européen (à l'occasion de l'élaboration d'une nouvelle directive sur le droit d'auteur), un dit « droit voisin » du droit d'auteur (se surajoutant, sans doute assez inutilement, aux droits d'auteur dont les entreprises éditrices sont déjà détentrices, à titre originaire, s'agissant d'œuvres collectives, ou en qualité de cessionnaires, du fait de dispositions spécifiques des articles L. 132-35 à L. 132-45 du code de la propriété intellectuelle, introduits par la loi du 12 juin 2009, des droits des journalistes sur leurs créations).

En octobre 2018, était annoncée la possibilité que le groupe Czech Media Invest (propriétaire de différents médias en République tchèque, en Pologne, en Roumanie et en Slovaquie et, en France, de Marianne), de M. Daniel Kretinksy, puisse acquérir entre 40 et 49 % et peut-être même, à un certain moment, a-t-il été envisagé que ce soit 100 % de la holding Le Nouveau Monde, de M. Matthieu Pigasse, l'un des actionnaires du groupe Le Monde. La cession a, pour le moment, concerné 49 % des parts. À cette occasion, il a été rappelé qu'il existe, en France, « des règles limitant la concentration de la propriété des médias » (loi du 1er août 1986). « Mais, outre qu'elles sont insuffisantes et peu appliquées, et qu'elles n'ont pas été mises à jour et adaptées à l'âge numérique, ces lois n'ont jamais cherché à redéfinir la forme juridique des organes de presse. On continue de partir du principe que la société par actions constitue l'organisation normale des médias ». À l'encontre de cette réalité, a été suggérée « une forme intermédiaire entre les fondations et les sociétés par actions. Par exemple, avec les sociétés de médias à but non lucratif » avec des « apports des journalistes, des lecteurs et des donateurs ».

M. Kretinsky poursuivit ensuite ses démarches en vue d'autres rachats dans la presse française. En février 2019, le groupe Lagardère lui vendait, pour 52 millions d'euros, l'essentiel de ses titres (Elle, Télé 7 jours, France Dimanche, Ici Paris…) de la presse magazine en France.

Au même moment, était envisagé le rachat de Mondadori France (Closer, Grazia, Science et Vie, Télé Star…) par Reworld Media. Il était indiqué que, fondée en 2012, cette « entreprise s'est bâtie en mettant la main sur des magazines chancelants, puis en les réorientant vers le numérique ». Elle a ainsi racheté Marie France, Gourmand, Vie pratique, Maison & Travaux, Pariscope, Auto Moto… L'opération ferait de ce groupe « le premier éditeur de presse magazine en France, avec un chiffre d'affaires de 484 millions d'euros ». Reproche lui était fait, par les personnels concernés, de recourir à des stagiaires et à des « pigistes payés sous le statut d'autoentrepreneur », de faire largement appel à des agences de presse et d'externaliser la production, et surtout que « les articles promotionnels financés par des marques (…) se sont multipliés sur les sites des revues », la publicité ayant pris l'ascendant sur l'éditorial. Deux mois plus tard, il était mentionné que, « si le petit groupe de presse Reworld Media, aux pratiques sociales et éthiques contestées, rachetait, en janvier 2019, la trentaine de titres français de l'italien Mondadori, il deviendrait le premier éditeur de magazines de l'hexagone ».

Dans un appel au don, adressé au public, un magazine (Sciences Humaines) évoquait, de manière plus générale, les « lames de fond qui agitent l'économie de la presse écrite : crise de la diffusion, hausse des prix du papier et des frais postaux, disparition des points de vente de journaux (encore 750 points de vente perdus cette année !), concurrence d'Internet, fuite des annonceurs vers Google ou Facebook ». Il indiquait que « ces bouleversements ne sont pas conjoncturaux » et qu'ils incitent « chacun à repenser durablement son modèle économique ». Il mentionnait que, en ce qui le concerne, pour maintenir son « indépendance éditoriale, intellectuelle », il s'est maintenu « à l'écart des groupes de presse » et des « groupements financiers », et qu'il « n'y a pas d'indépendance intellectuelle et éditoriale sans indépendance économique et financière ». Pour inciter au don, il rappelait que son montant pourra, pour les généreux donateurs, être déduit de l'« impôt sur le revenu » (plus exactement : du revenu imposable !) « à hauteur de 66 % ».

Fin 2018, était envisagé le retrait du groupe belge Nethys du capital des sociétés éditrices de Nice-Matin (dont il détenait 34 % des actions) et de La Provence (dont il détenait 11 % des actions). Bien qu'il l'ait démenti, M. Bernard Tapie, actionnaire de La Provence, manifestait alors son intérêt pour les parts détenues par Nethys dans Nice-Matin. Les représentants syndicaux du journal soulignèrent que « le groupe est assis sur une mine d'or qui suscite beaucoup de convoitises » et dirent craindre « une opération immobilière plus qu'un véritable projet dans un groupe de presse », la société éditrice détenant une parcelle de deux hectares au cœur de la métropole niçoise.

Au même moment, un collectif de scientifiques a relayé les inquiétudes des journalistes de Science & Vie, « dans la perspective d'un changement de propriétaire de leur groupe de presse. Ils craignent que leur indépendance éditoriale soit remise en cause, que des groupes d'intérêt et des industriels peu scrupuleux puissent, à l'avenir, imposer leurs vues dans leurs magazines ».

Présentant, à destination de ses lecteurs, un état de sa situation économique, le quotidien catholique La Croix faisait mention d'« une année compliquée pour toute la presse française : fragilisation de notre système de distribution, âpre concurrence des géants de l'Internet, questionnement sur le rôle des médias à l'ère des réseaux sociaux, de l'“infobésité” et des infox ». En ce qui le concerne cependant, il affirmait que, « avec plus de 80 % de ses revenus issus de l'abonnement (…) les lecteurs sont maîtres » et que la fidélité de ses abonnés « est le socle de l'équilibre économique du journal et de son indépendance ».

À la mi-janvier 2019, il était annoncé que, « plus d'un an après être entré dans le capital de Challenges (…) Renault va accroître sa participation dans le groupe de presse de Claude Perdriel, incluant (…) les mensuels scientifiques “Sciences et Avenir” et “La Recherche”, ainsi que les titres “Historia” et “L'Histoire” » et que, « à l'occasion d'une augmentation de capital de l'ordre de 5 millions d'euros, prévue en avril, le constructeur automobile français passera de 40 % à 45 % ». Un tel taux peut être source d'inquiétudes légitimes quant à l'indépendance éditoriale du titre en ce qui concerne tout au moins le traitement de l'information relative à l'industrie automobile et à ses activités annexes.

À propos du quotidien L'Opinion, il était fait mention d'une perte de 1 million d'euros en 2018, après celle de 2 millions d'euros l'année précédente. S'agissant de la répartition du capital, il était indiqué que : M. Nicolas Bey en détiendrait près de 22 % ; M. Bernard Arnault, propriétaire (dans la presse) des Échos, en détiendrait environ 20 % ; et Téthys, la holding de la famille Bettencourt, en détiendrait à peu près 17 %. En janvier 2019, à l'occasion d'une augmentation de capital, un milliardaire américain y a apporté 2,5 millions d'euros.

Début février 2019, était annoncée l'intention de M. Patrick Drahi, PDG du groupe Altice (détenant, par ailleurs, BFM-TV et RMC), de céder 51 % du capital de L'Express (qui a subi, en 2018, une perte de près de 15 millions d'euros, pour un chiffre d'affaires d'une quarantaine de millions d'euros) à M. Alain Weil, en prenant le contrôle à titre personnel, et de relancer Libération (dont le chiffre d'affaires est tombé de 40 à 34 millions d'euros, entre 2017 et 2018, avec une perte d'environ 5 millions d'euros).

En mars 2019, le groupe Mediaschool (CB News et Stratégies) faisait l'acquisition du Journal du luxe.

À la même date, ont été désignés les bénéficiaires français (La Croix, Le Figaro, L'Équipe, Le Monde, Le Télégramme et le groupe de presse régionale EBRA) du Fonds Google pour l'innovation, d'un montant (assez modique pour ledit fonds instauré pour apaiser les revendications en matière de paiement des droits d'auteurs liés à l'exploitation des contributions des journalistes qui n'en sont pas directement bénéficiaires !) de 6,6 millions d'euros.

Présentant (ce que bien peu de publications font) ses comptes pour l'année 2018, le groupe Le Monde faisait notamment état d'« un résultat net, bénéficiaire pour la troisième année consécutive, à + 14,6 millions d'euros, en nette progression sur le résultat net 2017 » principalement dû à « la croissance du portefeuille d'abonnés numériques du “Monde ». Il était, par ailleurs, fait mention de ce que l'année 2018 a été marquée « par l'annonce de l'évolution, à ce stade minoritaire, de l'actionnariat de la holding de Matthieu Pigasse, l'un de nos actionnaires majoritaires », et de ce que, « des discussions sont menées par le Pôle d'indépendance (qui regroupe les sociétés de rédacteurs et plus largement l'actionnariat salarié et la société des lecteurs) pour formaliser un droit d'agrément préalable avant toute entrée majoritaire au capital ».

En avril 2019, le site d'information en ligne StreetPress, par ailleurs producteur de contenus éditoriaux pour diverses organisations et entreprises, annonçait vouloir compter sur la générosité de ses lecteurs en proposant aux internautes de le soutenir financièrement par un don mensuel.

Dans une moindre mesure, l'actualité de l'économie des médias, au cours de l'année considérée, a concerné aussi, s'agissant des activités d'édition ou de production, d'autres secteurs que celui de la presse périodique.

b) Autres secteurs

En juillet 2018, le PDG de l'Agence France Presse (AFP) a indiqué vouloir accélérer les investissements dans la vidéo dont il fait une priorité. Faisant état d'un chiffre d'affaires de 299,5 millions d'euros pour l'année 2017, il a prévu « deux ou trois années difficiles » à cet égard. Quelques mois plus tard, un article consacré à la situation de l'agence faisait état d'une « chute de ses recettes » et d'une « hausse de ses charges », entraînant « une perte de 1,7 million d'euros pour 2018 », compensée par un « soutien exceptionnel » de l'État (venant après quelques autres).

Le secteur du livre mérite particulièrement l'attention. Selon une étude du Syndicat national de l'édition (SNE), « le chiffre d'affaires des éditeurs a baissé de 1,6 % en 2017, à 2,79 milliards d'euros (…) les ventes de livres en France ont chuté de 1,9 %, à 2,65 milliards (…) la production éditoriale, elle, ne faiblit pas : les éditeurs ont sorti 104 671 titres (+ 1,1 %) dont 47 538 nouveautés – soit 130 par jour ! – et 57 133 réimpressions. Cette inflation s'effectue au détriment des tirages qui continuent de baisser : - 6 %, à 5 341 exemplaires en moyenne ». Trois secteurs continuent de croître : la littérature, les BD et mangas et les ouvrages de documentation. « L'édition numérique – portée par la demande professionnelle et universitaire – poursuit sans relâche sa croissance (+ 9,8 %) et franchit le cap de 200 millions d'euros ». Est, par ailleurs, constatée la poursuite de la concentration dans l'édition : « les dix premiers acteurs cumulent à eux seuls 88,9 % du chiffre d'affaires du secteur ». Il est fait état d'une parution annuelle de 68 000 titres de livres (chiffre différent de celui qui a été précédemment mentionné !) et de ce que, « en trente ans, la production de livres a plus que triplé ». Certains observateurs dénoncent, à cet égard, une « saturation des parutions ». Il est indiqué qu'« il y a peut-être dix mille maisons d'édition en France » et que 4 455 d'entre elles ont « publié au moins un titre en 2017 ». Une autre étude fait état de ce que 75,8 millions de livres de poche ont été vendus, en France, en 2017, soit un livre sur quatre. En 2018, l'édition de livres a connu une baisse de 1 % par rapport à l'année précédente. Les romans sont les ouvrages qui se vendent le mieux : 36 titres sur les 50 meilleures ventes. Sur ces 50 titres, 32 étaient en format de poche. Le développement du livre numérique reste limité en France. S'il a crû de 9 % en 2017, il n'a toujours pas franchi les 5 % de parts de marché.

Un fort phénomène de concentration a été constaté, en 2018, dans le secteur de l'édition de livres. L'édition scolaire, qui représente entre 12 % et 16 % du chiffre d'affaires global de l'édition, apparaît particulièrement concentrée.

Par une décision du 2 janvier 2019 (19-DCC-01), l'Autorité de la concurrence a autorisé le rachat, tel que précédemment annoncé, pour 900 millions d'euros, d'Éditis (Julliard, Plon, Bordas, Nathan, Robert Laffont…), auparavant propriété du groupe espagnol Planeta, par Vivendi (Groupe Bolloré), considérant qu'il « n'aura pas pour effet de réduire la concurrence sur les nombreux marchés du secteur audiovisuel et littéraire ».

Dans le secteur du disque, il est fait état d'une « renaissance spectaculaire » du vinyle et de ce que, « en cinq ans, le petit marché du vinyle a été multiplié par cinq, en France, tant en valeur, avec 48 millions d'euros, qu'en volume, avec, 3,9 millions de disques vendus ». Cela fait que « le vinyle représente désormais un cinquième du marché des ventes physiques de musique ».

Du secteur de la production de l'information, est ici distingué celui, complémentaire et nécessairement lié, de sa diffusion.

B - Diffusion de l'information

À l'égard de la diffusion de l'information, il convient également, comme dans les développements précédents, de considérer : l'apport législatif et réglementaire (1) ; l'apport jurisprudentiel (2) ; et les faits d'actualité (3).

1 - Apport législatif et réglementaire

Diverses dispositions législatives ou réglementaires ont été adoptées ou sont actuellement en cours d'élaboration. Elles concernent la diffusion de la presse périodique et, plus modestement, d'autres secteurs tels que le cinéma.

a) Presse périodique

Dans un rapport d'information parlementaire, il a été noté que le système de distribution de la presse connaît une « crise profonde » et qu'il convient d'« entreprendre sans tarder des réformes structurelles et ambitieuses de l'organisation et de la régulation de la distribution ». Il y était relevé que, « si le système de distribution de la presse, organisé par la “loi Bichet” » (loi du 2 avr. 1947), « a pu s'avérer vertueux en période d'expansion et d'augmentation continue des volumes distribués, il montre aujourd'hui clairement ses limites » et appelle « une refonte en profondeur de l'organisation et de la régulation de la distribution ». Selon la PDG de la société Presstalis (un des deux réseaux nationaux de distribution de la presse) elle-même, il s'agit d'« un système arrivé à bout de course qui a dénaturé l'esprit de la loi de 1947 qui visait à garantir à chaque éditeur la possibilité d'être vu par le lecteur ». Il y était alors suggéré : d'« engager une réflexion sur le statut des sociétés coopératives de messagerie » ; de « rendre effective la libéralisation de l'assortiment des produits de presse ne relevant pas de la presse d'information politique et générale » ; et de « permettre, pour certains titres de presse à périodicité longue, une distribution directe entre éditeurs et diffuseurs ».

À peu près dans le même temps, dans un rapport au ministre de l'Économie et des finances et à la ministre de la Culture, élaboré après quelques autres qui, dans le passé, ont porté sur le même sujet, il a été notamment souligné que le système de « distribution de la presse vendue au numéro » constitue « un enjeu démocratique majeur, qui engage la libre circulation des idées et l'expression de la pluralité des opinions », mais qu'il est « aujourd'hui gravement menacé et appelle tant une nouvelle phase d'évolution de son modèle industriel qu'une réflexion approfondie sur l'adaptation des principes sur lesquels il se fonde depuis la “loi Bichet” de 1947 ». Parmi les propositions de réforme, il y était notamment suggéré : d'« unifier et renforcer la régulation » ; d'« instaurer, pour les éditeurs de presse, un “droit à être distribué” par des sociétés agréées, en remplacement » de l'actuel « statut coopératif obligatoire » ; d'« insuffler une nouvelle dynamique commerciale en allégeant les contraintes qui pèsent sur le réseau de vente » ; et enfin, « d'envisager l'extension de la loi à la diffusion numérique ». Ces propositions étaient reprises dans un « avant-projet de loi » (annexé au rapport).

En ce sens, un projet de loi de réforme du régime de la distribution de la presse était, le 10 avril 2019, adopté en Conseil des ministres. Il s'agirait de « moderniser l'environnement législatif sans casser les fondamentaux ». Il y est notamment prévu : d'ouvrir le secteur à de nouveaux acteurs tels que La Poste et Géodis (filiale de la SNCF) ; de donner plus de marges de manœuvre aux marchands de journaux (dans leur approvisionnement et la sélection des titres mis en vente par eux, tout en leur faisant obligation de proposer les titres de presse d'information politique et générale) ; d'ouvrir des points de vente dans les supermarchés et les commerces spécialisés ; et de prendre en compte le numérique. Le jour même, une grève était déclenchée, chez Presstalis, par la CGT, pour s'opposer à un tel projet…

b) Autres secteurs

Par le décret no 2019-216 du 21 mars 2019, a été modifiée « la partie réglementaire » (art. D. 231-2 et D. 231-3) « du code du cinéma et de l'image animée », en ce qui concerne le « délai d'exploitation des œuvres cinématographiques sous forme de vidéogrammes ». Peuvent « désormais être exploitées en vidéo physique, dans un délai inférieur à quatre mois, les œuvres qui ont réalisé 100 000 entrées au plus à l'issue de leur quatrième semaine d'exploitation en salles ».

2 - Apport jurisprudentiel

Aucun apport jurisprudentiel notable, relatif à la diffusion de l'information, n'a été relevé au cours de la période considérée.

3 - Faits d'actualité

a) Presse périodique

L'actualité de la diffusion de la presse périodique est riche d'événements, s'agissant d'un secteur en grandes difficultés (appelé à être réformé, comme précédemment indiqué).

Fin mai 2018, la société Amazon annonçait qu'elle allait assurer, auprès de ses abonnés “Prime Now” (auquel elle garantit une livraison en moins de deux heures) résidant à Paris et dans 25 communes environnantes, la distribution du quotidien sportif L'Équipe.

Début juin 2018, Altice France-SFR modifiait les conditions de fonctionnement de son kiosque numérique. Les clients devront désormais payer le coût de l'abonnement (entre 5 et 10 € par mois, selon qu'ils sont ou non abonnés SFR) et l'opérateur versera, aux 50 titres de presse concernés (au lieu de 89 auparavant), un montant fixe forfaitaire (au lieu, comme auparavant, des 25 à 45 centimes par exemplaires). Mention est faite du dilemme devant lequel vont se trouver les éditeurs « de taille modeste » : « être présent dans un kiosque d'opérateur à 5 ou 10 € par mois » ou « recruter en direct des abonnés numériques à 7 ou 10 € ».

Se préoccupant notamment de la distribution de la presse, depuis longtemps en crise grave, un autre rapport parlementaire relève que « de nouveaux modes de distribution prometteurs émergent et cherchent à trouver un modèle économique viable. Les kiosques numériques (…) conquièrent chaque jour de nouveaux usages et offrent un canal de distribution rénové à toute une partie de la presse ». La question est posée de savoir s'ils constituent « le futur de la distribution de la presse ? ». Il est considéré que « les offres proposées par les grands kiosques numériques apparaissent comme des alternatives séduisantes, à la fois pour les lecteurs, mais également pour les éditeurs qui peuvent élargir leur lectorat pour un coût de distribution quasiment nul ». Il est cependant estimé que, « service innovant très peu encadré, les kiosques numériques bousculent les usages de distribution et de lecture de la presse ». Des questions sont posées à leur égard : « ces services font-ils concurrence et cannibalisent-ils les autres offres, marchands de presse ou sites des titres, ou correspondent-ils à de nouveaux usages (…) les kiosquiers peuvent-ils s'imposer comme une solution de distribution alternative et viable permettant d'endiguer la baisse des ventes » et peuvent-ils eux-mêmes, « parvenir à un équilibre économique » ?

Dans un article de présentation de son ouvrage, il est fait dire à Jean Rouaud, qui fut kiosquier, à Paris, de 1983 à 1990, que, « aujourd'hui, il n'y a presque plus de journaux dans les kiosques. Quand j'y travaillais, ils débordaient de publications, pour tous les goûts ». Ils sont désormais encombrés de toutes sortes d'objets et de produits de souvenirs dont la vente est destinée à augmenter un peu le chiffre d'affaires des kiosquiers et à assurer ainsi la survie de leur activité.

Selon les indications fournies par l'Alliance pour les chiffres de la presse et des médias (ACPM-OJD), la presse grand public a connu, en 2018, avec un chiffre global de 3 milliards d'exemplaires, une baisse de plus de 4 % de sa diffusion par rapport à l'année précédente. Si la presse quotidienne nationale (ayant été en fort déclin il y a plusieurs dizaines d'années) est désormais à peu près stable s'agissant des imprimés, la plupart des autres catégories (presse quotidienne régionale et départementale, presse magazine…) sont en baisse. Pour toutes les catégories, la diffusion des versions numériques connaît une hausse réelle.

Le 1er janvier 2019, plusieurs titres de la presse quotidienne nationale (Le Monde, L'Équipe, L'Humanité, Les Échos) ont augmenté (de 10 ou 20 centimes) le prix de vente de leur édition papier, en raison notamment de l'augmentation de leurs coûts de production et de distribution. Ils courent ainsi le risque de voir encore baisser leurs chiffres de diffusion.

b) Autres secteurs

Divers faits d'actualité concernent, s'agissant de la diffusion de l'information, de nombreux secteurs tels que le livre, les librairies, les bibliothèques, le cinéma.

Deux études du ministère de la Culture ont porté sur l'impact du numérique sur la consommation culturelle. Il y est relevé que le secteur du livre a été faiblement touché, le livre numérique occupant une place encore marginale, de l'ordre de 7 à 8 % du chiffre d'affaires de l'édition et de la librairie. Il en va très différemment de la musique, qui a connu deux vagues de bouleversements : celle de la dématérialisation et du téléchargement, d'abord ; celle du streaming, ensuite. L'année 2018 est présentée comme ayant été « une année noire pour les libraires et les ventes de livres (…) Les lecteurs attendent de plus en plus la sortie d'un roman grand format en poche pour l'acheter moins cher ». Il est relevé que, « sur un marché de l'édition marqué par l'atonie, les ventes de BD ont enregistré une croissance de 6,3 % ». Il est cependant fait état de ce que, « outre la protection du prix unique dans un univers hyperconcurrentiel, la France bénéficie d'un réseau de librairies dont tous louent l'énergie, l'engagement, le professionnalisme et la passion », constitutif d'un « maillage vivace, dense et de qualité, dans tout le pays ». Soulignant le caractère exceptionnel de l'ouverture d'une nouvelle librairie, il est indiqué que, « depuis 2000, Paris a perdu 350 librairies, soit une sur trois (…) Il n'en reste plus qu'environ 715 ».

Dans le secteur de la librairie, a été annoncée, à la fin de l'année 2018, le rachat de Decitre par le Furet du Nord, l'Autorité de la concurrence ayant, par décision du 26 décembre 2018 (18-DCC-227) rendu un avis favorable à cet égard.

Certaines librairies spécialisées, telles que les librairies religieuses, sont menacées dans leur existence.

La lutte des libraires contre Amazon se poursuit de multiples manières et parfois des plus inattendues. En mars 2019, le maire d'Épinal, sur avis de l'architecte des bâtiments de France, a fait part de son opposition à l'installation, dénoncée par une librairie se trouvant à proximité, de casiers de retrait de colis dans l'enceinte de la gare.

Diverses maisons d'éditions étrangères francophones se préoccupent d'assurer la diffusion de leurs ouvrages en France. Pour ce qui est des bibliothèques, il est fait état de ce que, « un an après le rapport Orsenna » (sorti, en librairie, sous le titre Voyage au pays des bibliothèques, Stock), souhaitant notamment que les bibliothèques ouvrent « mieux et plus », 171 établissements sur 7 700 « ont étendu leurs horaires, surtout dans les petites villes ». Il est par ailleurs indiqué que « seuls 12 % des Français empruntent des livres en bibliothèque » et que « ce chiffre est en baisse constante depuis vingt ans ». Un exemple de contribution des bibliothèques à la diffusion et à l'animation culturelles a pu être décrit.

S'agissant des relations entre le cinéma et la télévision, et particulièrement de la chronologie des médias, les négociations entre Canal + (principal banquier du cinéma français, avec un montant de 114 millions d'euros de préachat de films en 2017) et les différentes organisations du cinéma français ont, un temps, été rompues en octobre 2018. Un accord a cependant été conclu en décembre, rendu obligatoire par arrêté du 25 janvier 2019.

Au même moment, il était fait mention de l'existence d'une « petite structure spécialisée dans l'agrégation de films destinés à être vendus et diffusés sur des plateformes de vidéo à la demande (VOD) dans le monde entier (…) comme le fait Netflix ».

Il a été fait état de ce que « l'exportation du cinéma français a réalisé, en 2018, ses pires résultats depuis vingt-cinq ans (…) le nombre de spectateurs dans les salles étrangères a violemment chuté de 52 % en 2018, pour atteindre 40 millions, contre 82,5 millions en 2017. Les recettes ont baissé, en conséquence, à 237 millions d'euros ». Pour certains observateurs cependant, « cette évolution erratique » s'expliquerait par le fait que, d'une année sur l'autre, « un ou deux films suffisent à faire la différence ». Mention a été faite de ce que, s'agissant du cinéma, « la France possède le plus grand parc d'Europe, le plus moderne aussi, avec près de 6 000 salles sur tout le territoire », et que l'on a compté, en 2018, « plus de 200 millions d'entrées, malgré le développement des pratiques individuelles sur tablettes, smartphones ou ordinateurs, malgré la concurrence des plateformes numériques qui est de plus en plus forte ».

De manière globale, il était relevé que, après deux années de timide reprise, le marché de la publicité a connu, en 2018, une croissance de 4,2 %, grâce notamment à une progression de 17 % de la publicité sur Internet.

Cette économie encadrée est aussi, officiellement pour remédier à certaines de ses difficultés et garantir le pluralisme de l'information et la diversité culturelle, en application de la théorie de l'État « providence » ou « interventionniste », une économie assistée.

II - Économie assistée

L'actualité des aides publiques aux activités médiatiques concerne tant la production de l'information (A) que la diffusion de l'information (B) auprès du public.

A - Production de l'information

À l'égard de la production de l'information sous différentes formes, des éléments relatifs à l'apport législatif et réglementaire (1), à l'apport jurisprudentiel (2) et surtout différents faits d'actualité (3) peuvent également être relevés.

1 - Apport législatif et réglementaire

Par le décret no 2018-591 du 9 juillet 2018, adopté « sur la proposition de la ministre de la Culture », il avait été posé que celle-ci, afin d'éviter tout conflit d'intérêt avec ses activités d'éditrice (antérieures et qu'elle a reprises depuis qu'elle a quitté le gouvernement), ne connaîtrait « pas des actes de toute nature relatifs : 1. à la société “Actes Sud” ; 2. à l'exercice de la tutelle du Centre national du livre ; 3. À la régulation économique du secteur de l'édition littéraire » et que « les attributions correspondantes » seraient « exercées par le Premier ministre ». À son départ du gouvernement, ce décret a été abrogé par le décret no 2018-890 du 16 octobre 2018, rendant au nouveau ministre de la Culture ? la totalité de ses compétences en la matière.

À propos des « dispositions relatives au financement de la presse », un rapport parlementaire a relevé que « le financement citoyen de la presse d'information politique et générale », en contrepartie d'avantages fiscaux, « peine à s'imposer » et que le statut, « fiscalement attractif », d'entreprise solidaire de presse d'information constitue « un potentiel encore largement inexploré ».

En février 2019, le magazine trimestriel Têtu indiquait avoir obtenu le statut de publication d'information politique et générale, lui permettant d'accéder aux aides au pluralisme de la presse. Par la délibération no 2018/CA/17, du 21 septembre 2018, modifiant le règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, le Conseil d'administration dudit CNC a adopté un certain nombre de mesures nouvelles concernant notamment le « soutien à la création cinématographique et à la diffusion en salle », s'agissant : des « sommes investies par les entreprises de production » ; des « dépenses d'écriture, de réécriture et d'achat de droits » ; des œuvres dites d'« animation » ; des « salles de spectacles cinématographiques » ; du « soutien à la création audiovisuelle et multimédia » ; des « aides à la production des œuvres immersives ou interactives » ; du « soutien à la diversité de la création et à la diffusion auprès des publics » ; du « soutien aux actions en faveur du patrimoine cinématographique » ; du « soutien à la diffusion vidéographique et à l'innovation technologique » ; des « aides financières sélectives pour la diffusion en ligne d'un programme d'œuvres cinématographiques ou audiovisuelles ».

L'aide aux « publications nationales d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires » a été l'objet d'un arrêté du 30 novembre 2018 pris pour l'application de l'article 3 du décret no 86-616 du 12 mars 1986 modifié qui y est relatif. Il y est posé que « la valeur de référence prévue au a de l'article 3 » dudit décret « est fixée à cent quatre-vingts millions d'exemplaires pour l'aide attribuée en 2018 ».

Par l'article 118 de la loi du 28 décembre 2018, de finances pour 2019, a été prolongée d'un an (pour l'année 2019) l'application des dispositions de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts (CGI) relatives à la « réduction d'impôt accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital d'entreprises de presse ». Par l'article 146 de la même loi de finances, ont été complétées les dispositions de l'article 220 quaterdecies du code général des impôts relatives au crédit d'impôt dont peuvent bénéficier les entreprises de production cinématographique et audiovisuelle.

Le 24 avril 2019, le Syndicat de la presse indépendante de l'information en ligne (SPIIL) publiait un « Manifeste pour une presse économiquement indépendante de l'État et des GAFA ». Il y contestait l'initiative de l'Alliance de la presse d'information générale (APIG) recommandant « d'augmenter significativement les aides à la presse en les ciblant sur les activités papier des éditeurs d'information politique et générale (IPG) », alors que, pour lui, « le vrai enjeu est de permettre aux citoyens d'accéder à une information indépendante et pluraliste » et qu'il n'est nul « besoin de soutien public supplémentaire ». Il y dénonçait le fait que « l'État oriente aujourd'hui 90 % de ses aides directes vers le support papier, pourtant minoritaire dans les usages », et que « le but légitime des aides à la presse (favoriser le pluralisme) a été dévoyé au profit d'un soutien industriel à une filière parmi d'autres, celle du papier ». Pour ledit syndicat, « l'État s'immisce ainsi très fortement dans les stratégies des éditeurs, en favorisant le conservatisme. Il renforce des rentes de situation souvent monopolistiques ». Face à une telle situation, il recommandait « une refonte globale de toutes les aides à la presse, autour de cinq idées : neutralité des supports (…) proportionnalité selon l'usage et donc le lecteur (…) mise en place d'indicateurs de performance sur le pluralisme de l'information (…) encourager les éditeurs dans la voie de l'exigence déontologique (…) redéfinition de l'IPG en Information politique et citoyenne (IPC) ». Il estimait que « les éditeurs de presse doivent (…) s'attacher à ne pas dépendre des aides de l'État » car « celles-ci sont légitimes quand elles ont pour objet de garantir l'exercice démocratique, en permettant aux citoyens d'accéder à une information plurielle. Mais elles ne doivent jamais créer une situation de dépendance économique vis-à-vis de l'État ou des collectivités territoriales, ou susciter le trouble dans l'esprit du public sur une connivence supposée ». En conséquence, ledit syndicat proposait de : « limiter les aides directes à des projets d'investissement (…) favoriser les aides indirectes, comme le taux super-réduit de TVA (…) supprimer les niches fiscales obsolètes ou susceptibles d'être perçues comme clientélistes (…) accroître la transparence en publiant la doctrine d'attribution des aides directes (…) encourager les éditeurs à la transparence en publiant les aides reçues ».

2 - Apport jurisprudentiel

Au cours de la période considérée, aucun apport notable n'a été relevé à cet égard.

3 - Faits d'actualité

S'agissant de l'actualité des aides publiques à la production de l'information, il convient de distinguer la presse périodique et les autres secteurs.

a) Presse périodique

Se différenciant, à cet égard, de la plupart des titres de la presse française qui n'ont pas le même souci de transparence quant aux aides publiques dont ils bénéficient, le journal La Croix indiquait que, comme à d'autres publications (L'Humanité, L'Opinion…), l'État, au nom « du pluralisme de la presse d'information générale et politique », lui apporte, « depuis plusieurs années, une aide dite “Aide aux publications à faibles revenus publicitaires” ». Celle-ci a été, pour 2018, d'un montant de 2,93 millions d'euros. Il ajoutait que le journal a, par ailleurs, perçu une aide au portage à domicile qui a été, pour la même année, de 1,3 million d'euros.

b) Autres secteurs

Le Rapport d'activité du Centre national du livre (CNL), pour l'année 2017, faisait état de 1 005 aides d'État accordées aux éditeurs, pour un montant de 5,2 millions d'euros, notamment pour la publication d'ouvrages (2,1 millions), la traduction d'ouvrages (1,9 million) et le développement numérique (0,6 million). Il y était indiqué que ces aides se déclinent « en subventions et prêts visant à accompagner la prise de risque économique d'un éditeur en faveur d'une production éditoriale de qualité et diversifiée » et qu'elles ont, « par exemple, vocation à permettre aux éditeurs de baisser leur prix de vente, augmenter le tirage d'un ouvrage, se lancer dans la numérisation de leur production ou encore mettre en œuvre des projets de développement ».

Pour compenser les pertes financières de l'Agence France presse (AFP), celle-ci devrait bénéficier, en 2019, d'un soutien, dit « exceptionnel » mais pourtant assez habituel, de l'État, d'un montant de 11 millions d'euros.

Aux aides publiques à la production d'information s'ajoutent celles qui sont accordées à sa diffusion.

B - Diffusion de l'information

À l'égard de la diffusion de l'information, il convient de considérer également l'apport législatif et réglementaire (1), l'apport jurisprudentiel (2) et des faits d'actualité (3).

1 - Apport législatif et réglementaire

Il convient à tout le moins d'évoquer le bilan de l'application de quelques-uns de ces textes et, par voie de conséquence, certaines remises en cause et propositions de réforme.

Un rapport parlementaire a fait notamment le bilan de l'application de la loi no 2014-779 du 8 juillet 2014, introduisant, dans la loi no 81-766, du 10 août 1981, relative au prix du livre, des dispositions concernant le rabais (d'au maximum 5 % du prix du livre), sur les seuls frais de livraison, qui peut être pratiqué s'agissant de la vente à distance de livres, « sans pouvoir offrir ce service à titre gratuit ». Y est posée la question de l'efficacité d'une disposition « interdisant la gratuité des frais de port qui conduit les grandes plateformes (…) à facturer ceux-ci à un centime d'euro ».

Pour tenter de sauver Presstalis, la principale messagerie de presse, de la situation de crise qui est la sienne depuis des années, l'État a décidé de consacrer, pendant quatre ans, la moitié du budget du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) à renflouer ses pertes. Pour 2018, cela a représenté 18,2 millions d'euros. Dans un communiqué en date du 2 octobre 2018, le Syndicat de la presse indépendante d'information en ligne (SPIIL) a dénoncé le fait que, par une « décision prise dans l'opacité la plus totale », l'État « détourne l'une des seules aides à la presse neutre en termes de supports et consacrée à l'accompagnement de la transformation numérique de toutes les entreprises de presse » et « la vision court-termiste de cette décision (…) artifice imposé dans l'urgence, là où une politique globale et concertée sur l'équilibre de l'écosystème de la presse paraît indispensable ».

Début avril 2019, l'Alliance de la presse d'information générale (APIG) réclamait de nouvelles aides de l'État notamment en matière de distribution telles que : TVA à taux zéro ; requalification fiscale du portage en service à la personne, permettant ainsi aux abonnés de bénéficier d'un crédit d'impôt.

2 - Apport jurisprudentiel

S'agissant d'un rappel de taux de TVA applicable à la vente des services de presse en ligne, le tribunal administratif avait été saisi d'un recours de la société éditrice de Mediapart qui contestait que lui soit imposé le taux dit « normal », de 20 %, au lieu du taux dit « hyperréduit », de 2,1 %, appliqué aux publications périodiques imprimées. Se fondant sur les dispositions qui étaient en vigueur dans les années en cause, le jugement a rejeté le recours (TA Paris, 2e sect., 1re ch., 22 mai 2018, no 169984/2-1). Depuis, la loi no 2014-237 du 27 février 2014, a harmonisé les taux de TVA applicables. Après que la France a été condamnée, par la Cour de justice de l'Union européenne, pour violation du droit européen, celui-ci, par la directive (UE) 2018/1713 du 6 novembre 2018, modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne les taux de taxe sur la valeur ajoutée appliquée aux livres, journaux et périodiques, a admis l'application du taux de TVA particulier à de tels services.

3 - Faits d'actualité

L'actualité des aides publiques à la diffusion de l'information concerne, elle aussi, la presse périodique et divers autres secteurs.

a) Presse périodique

Différents éléments, précédemment mentionnés, concernant la presse périodique auraient pu être considérés ici comme constituant des faits d'actualité.

b) Autres secteurs

Le Rapport d'activité du Centre national du livre (CNL), pour l'année 2017, fait état d'un soutien, aux bibliothèques, d'un montant de 5,10 millions d'euros, et d'un soutien, aux libraires, de 3,45 millions, constitué de « subventions et prêts visant à accompagner la prise de risque économique liée à l'activité de vente de livres neufs dans un local commercial et à favoriser le développement d'un réseau de libraires de référence présentant une offre de création éditoriale diversifiée et de qualité ». Pour l'année 2018, il est fait mention de ce que, répondant aux mêmes objectifs, « 377 aides ont été attribuées par le CNL, aux libraires, pour un montant de 3,58 millions d'euros ». Il a été relevé que l'accès au « patrimoine cinématographique » (ou qualifié comme tel !) est source d'inquiétudes. À propos de la « restauration des films anciens », il a été fait état de ce que, en 2018, le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) a été « contraint, pour des raisons budgétaires, de réduire drastiquement les aides qu'il accordait, depuis 2012, à la numérisation des films de “patrimoine” ». La situation devrait s'aggraver en raison du « tarissement de la manne des 64,5 millions d'euros qui a permis, entre 2012 et fin 2018, de numériser 1 123 films » et du fait que « les aides, qui étaient de 9 millions d'euros en 2018, vont tomber à 2,8 millions par an jusqu'en 2021 ».

S'agissant du droit économique des médias, la période considérée (1er mai 2018 – 30 avr. 2019) a sans doute été marquée par une assez grande continuité. Les difficultés, du secteur de la presse périodique notamment, subsistent et peut-être même s'aggravent. Les apports du droit apparaissent assez inaptes à y remédier. Conviendrait-il dès lors de le remettre en cause et d'en alléger les dispositions et les spécificités ou, au contraire, d'en accroître le nombre et les particularités ? Une approche globalisante est sans doute erronée. Tous les médias ne contribuent pas de la même façon au débat démocratique et à la diffusion culturelle. Ils ne peuvent pas, de ce fait, prétendre aux mêmes droits. Ils ne doivent pas se voir imposer les mêmes obligations.

E. D.

29 août 2019 - Légipresse N°372
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