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Accueil > Communications électroniques > La loi de 1881 n’est pas le problème mais la réponse qu’il faut préserver - Communications électroniques

Haine en ligne
/ Tribune


28/10/2020


La loi de 1881 n’est pas le problème mais la réponse qu’il faut préserver



 

Au moment d’écrire ces lignes, Samuel Paty, professeur d’histoire et d’instruction civique,venait d’être sauvagement assassiné dans la rue, après avoir été désigné sur les réseaux sociaux comme un ennemi de l’Islam. Il lui était reproché d’avoir montré à ses élèves collégiens des caricatures de Mahomet. Il entendait ainsi illustrer les principes de liberté d’expression et la laïcité, tels qu’ils avaient été judiciairement consacrés lors du procès contre les dessinateurs de Charlie Hebdo ; principes cardinaux de notre grand et beau pays.

L’évocation de ce drame national, comme l’avait été celui des attentats de janvier 2015(1), ne pouvait être absent de nos colonnes. C’est à nouveau la liberté d’expression qui est en cause. Notre rédaction adresse à la famille et aux proches de ce « héros tranquille », ainsi que l’a appelé Robert Badinter(2), comme à l’ensemble du corps enseignant, sa sympathie et son soutien.

Le paradoxe de cette nouvelle atteinte à notre ordre républicain, pour ceux qui ne supportent pas la vue de tels dessins, c’est qu’elle a eu pour résultat immédiat leur nouvelle diffusion internationale. L’autre paradoxe c’est que l’émotion qu’elle a provoquée va vraisemblablement avoir pour conséquence l’adoption de nouvelles restrictions législatives à… la liberté d’expression. Il en est toujours ainsi. A chaque catastrophe doit répondre une nouvelle loi. Et, ça ne va pas manquer, les éternels adversaires de la loi de 1881 vont soutenir qu’elle a aussi sa part de responsabilité dans ce drame, en ce qu’elle serait inadaptée à la traque des propos haineux et des trolls qui les diffusent.

En réalité, loin d’être en quoi que ce soit la cause de ce drame, la loi 1881 est le texte, comme celui de 1905, qu’il faut préserver coûte que coûte. C’est une loi libérale qui recueille en son sein toutes les incriminations utiles. Il suffit juste de se donner les moyens de les poursuivre. Et, c’est précisément cette loi qu’aimeraient voir abrogée ceux qui en veulent à notre système démocratique.

La seule loi dont les objectifs devraient être remis sur le métier, c’est celle que portait la députée Laetitia Avia, et qui a été censurée par le Conseil constitutionnel en juin dernier(3). Il est indispensable en effet de rendre responsables les plateformes qui propagent et amplifient les contenus les plus viraux et les plus violents. Comme l’a dit Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques(4) : « L’opacité du fonctionnement de leurs algorithmes et de leur modération est une aberration sociétale et démocratique ». Comme il est aberrant qu’elles tentent d’imposer leur propre justice plutôt que de se conformer aux décisions judiciaires nationales, lesquelles, rappelons-le, peuvent être rendues en urgence lorsqu’il le faut. Cette responsabilisation devrait s’inspirer de la bonne vieille « cascade » de responsabilité de la loi de 1881, laquelle fait du colporteur le responsable de l’écrit litigieux, lorsque l’auteur et son imprimeur sont restés dans l’anonymat, et qu’il n’a pas voulu révéler leurs identités.

C’est à ce prix que la loi de 1881 qui réprime les « abus » de la liberté d’expression, tout en assurant l’effectivité de cette dernière, pourra être utilement mise en œuvre, sous le contrôle vigilant du juge, gardien de nos libertés.

28 octobre 2020 - Légipresse N°386
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